Le choc d’une guerre longue en Ukraine : le temps joue-t-il vraiment en faveur de la Russie ?

Anne de Tinguy, professeure des universités et chercheuse émérite au CERI, a coordonné le 9e opus de l'Etude du CERI intitulée Regards sur l'Eurasie. L'année politique 2023  que nous publions sur notre site. Elle a répondu à nos questions. 

Après le 7 octobre"En 2023, les évolutions en Eurasie restent dominées par la guerre d’agression contre l’Ukraine déclenchée le 24 février 2022 par la Russie, une guerre qui a de fortes répercussions au sein de l’espace postsoviétique et au-delà dans un contexte international marqué par une montée des crises. Ce qui distingue 2023 de 2022, c’est notamment la perception de la durabilité du conflit ainsi que la montée des tensions et des incertitudes.

Fin 2022, il apparaissait déjà clairement que la guerre risquait de durer, mais, du fait des piètres performances militaires de la Russie, de la remarquable résistance ukrainienne et de la forte mobilisation des Occidentaux aux côtés de Kiev, l’espoir qu’il en soit autrement était très présent en Ukraine et en Europe. Erreurs de jugement, préparation inadaptée de l’intervention, dysfonctionnements logistiques, défauts de commandements, insuffisance des effectifs engagés, etc. : en dépit d’une forte supériorité numérique en hommes et en matériels, ce que le Kremlin a appelé une « opération militaire spéciale » a très vite été un échec. Dès les premières semaines, les dirigeants russes sont contraints de renoncer à l’idée d’une capitulation rapide de l’Ukraine et de revoir leurs objectifs à la baisse. Les choses évoluent au cours de l’hiver 2022-2023. La Russie, dont l’évolution politique est analysée dans ce volume par Gilles Favarel-Garrigues, semble apprendre de certaines de ses erreurs et s’adapter à son adversaire, elle construit des lignes de défense le long de la ligne de front et met en place une économie de guerre en augmentant fortement son budget de la défense. Cette politique lui permet de contenir les forces ukrainiennes - la contre-offensive terrestre lancée en juin 2023 par les Ukrainiens n’a pas donné les résultats escomptés par Kiev, les forces russes occupent toujours quelque 17% du territoire ukrainien - , mais pas de remporter des succès majeurs. Les combats continuent, mais aucun des deux adversaires ne remporte de victoire décisive. Résultat, le front terrestre étant quasiment figé, l’issue du conflit ne se dessine toujours pas, d’autant moins que Vladimir Poutine ne donne aucun signe de vouloir se désengager et Volodymyr Zelensky, de renoncer à chasser l’envahisseur."


 

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